[Partie 1] L'histoire (RP)

Comme chaque jour, Forestine arrivait de bonne heure à la boulangerie. Faire le ménage lui rapportait un petit pécule, mais il était nécessaire pour faire vivre sa famille.
Avec les derniers événements, son travail avait augmenté et du coup son salaire aussi.
Marie, la femme du boulanger, celle qui passait aux yeux de tous pour une femme forte et qui savait mener le petit personnel à la baguette, n'était plus que l'ombre d'elle même depuis la mort étrange du maire.
Non seulement elle avait perdu un excellent ami et très bon client, mais en plus on racontait partout que des loups garous avaient envahi Thiercelieux.
Marie n'osait plus sortir de son appartement personnel et avait demandé à Forestine de la replacer à la boutique.

Alors, même si les circonstances n'étaient pas réjouissantes, Forestine y trouvait son compte.
Cependant, en son fort intérieur, elle se blâmait. Elle avait bien songé à aller se confesser au curé du village, mais après le bûcher qu'il avait dressé en place publique, la brunette jugea plus sage de ne rien dire.

-Ah, tiens, bonjour Forestine. C'est toi qui t'occupe des clients aujourd'hui ?
-Bonjour Armande. Oui, oui, comme tu vois, c'est moi qui tient la boutique. Alors, qu'est-ce qu'il te faudrait ?
- Une miche de pain aux noix, ce sera tout.
- Voilà, ça te fera 3, 85 écus.
-Au fait, tu sais qui est le nouveau maire ? Non ? Hi hi hi....
- Pourquoi ris-tu ? Qui est-ce ?
- C'est Jehan, le commis fermier du Père Gustave.
- Ah ouiiiiii ! Je vois, le blondinet. Il est jeune, mais il me semble avoir la tête sur les épaules. Enfin, tu le connais mieux que moi, je crois, dit Forestine en faisant un clin d'oeil à son amie.

Armande éclata d'un rire joyeux et paya Forestine avant de sortir de l'échoppe.

Encore un beau matin, où Gomina se leva en faisant des prouesses dans le domaine du saut de lit : une jolie culbute, une torsade, trois petits bonds au plafond... mais... c'était sans compter sur le drap de lit, qui certainement dans le but de le retenir jalousement sur le sommier, s'enroula tout autour de son pied. Cela n'était évidemment pas suffisant pour perturber cet acrobate du pied levé. Non. Pire encore : par ce malencontreusement incident, Gomina se réceptionna sur un et unique pied, et le mauvais : le gauche.

Gomina su de ce fait que la journée n'allait pas être meilleure que la précédente.

Il se rendit donc à la mairie, après une hâtive préparation et un rapide petit-déjeuner qui ne durèrent pas plus de 2 heures tout cumulé.
Il avait bien l'intention de prendre ses responsabilités bien en main et œuvrer pour le bien du village au poste de maire qui lui était dû.
- Comment ? Je n'ai pas été élu maire ? fit-il devant la porte de la mairie en apprenant les résultats des élections qui lui semblaient gagnée d'avance. Qui donc a pris ma place ? Qui ça ? Jehan ? Jehan Qui ça ? Je n'ai jamais entendu parler de ce nom, à quoi ressemble cet homme ?

Il parti, contrarié, à la recherche d'une personne correspondant à la description qu'on lui donna. Si Gomina pouvait avoir un défaut, ça aurait été celui de ne pas avoir la mémoire des noms. Du moins, tant que cette personne ne lui avait pas acheté au moins une petite carriole.
- Pardon, auriez-vous vu un jeune homme blond, plutôt dégourdi de ses mains ? demanda-t-il à un passant. Blondinet ? Je cherche un blondinet ! Auriez-vous vu un blondinet ? Je ch...
C'est alors qu'il vit le bûcher. Un corps décomposé et carbonisé était en train de se disloquer sur des braises encore fumantes. A cette vue, il eut envie de vomir, et mit une main à sa bouche.
- Si c'est ça les premières mesures du nouveau maire, je ne tiens vraiment pas à assister aux suivantes !
Il tenta de toutes ses forces d'oublier cette vision, et fila droit en direction de l'Hôtel du Riz, persuadé de pouvoir s'y changer les idées.

alors qu'il s'appretait à quitter l'hotel, Jehan tomba nez à nez avec celui qu'il venait de chercher en vain.

Messire Gomina, Bonjour ! Je voulais vous féliciter pour votre score, même si je l'ai un peu dépassé dit Jehan en lui tendant la main avec un grand sourire

Je voulais vous demander si vous acceptez de prendre le relais au cas où il m'arriverait quelque chose dans les prochains temps. On ne sait jamais...

Gomina était remonté contre Jehan. Très. D'abord, la prise de la mairie, et puis le bûcher, avec l'affreuse mise à mort de cette jeune-femme innocente. Aussi, il décida de bien se faire entendre :
- Alors d'abord....

C'est alors qu'intervint Vladilir. Ce forgeron qui ne perdait pas une occasion pour relancer le commerce de la ferraille. Il compta bien lui dire deux mots :
- A vrai dire...

Marie-Line rit la parole. Cela le surpris car il ne l'avait pas vu arriver. Son visage lui disait quelque-chose, il avait certainement dû la croiser à plusieurs reprises ces derniers jours, mais il se souvenait plus vraiment des circonstances :
- Ah.

Il s'était contenté d'approuver ses dire avant de se faire interrompre par une quatrième personne.

Il fit alors la roue jusqu'à l'Hôtel du Riz à côté duquel ils étaient réunis, entra en ouvrant la porte d'un coup de talon, et s'exerça à quelques culbutes et autres figures artistiques devant quelques clients bien contents de profiter du spectacle, et qui l'acclamèrent et en redemandèrent en signant pour une nuit.
Ceci fait, une fois son égo regonflé à bloc, il revint en direction du petit groupe de discussion en moultes roulades successives Et une fois au milieu de tous, il e recoiffa une mèche et prit enfin la parole :
- Mademoiselle, messieurs, j'ai bien réfléchi à tout cela, et vous propose de regrouper divers habitants afin d'en discuter tous ensemble. Si nous pouvions déjà réunir quelques villageois supplémentaires, cela pourrait faire un bon début pour commencer notre enquête, qu'en dites-vous ? Si vous en êtes d'accord, j'ai une grande salle de libre dans mon hôtel qui pourrait convenir pour nous rassembler dans la plus grande tranquillité !

Les évènements se précipitaient et les villageois semblaient vouloir se mobiliser pour venir à bout du danger qui menacait le village. Jehan avait encore la main tendue vers Gomina lorsque Vladilir vint les rejoindre :
Des hallebardes, oui bien sûr, ca va nous être fort utile ! Si vous avez besoin d’aide, surtout, n’hésitez pas, je réquisitionnerai des villageois dont les activités ne sont pas primordiales afin que vous puissiez fournir les armes au plus vite.

Il avait tout juste répondu à Vladilir qu’il entendit une phrase qui le fit frémir. Marie-Line semblait vouloir dire… en fait, elle disait très clairement qu’il pouvait s’agir de villageois qui se tranformaient durant la nuit. Jehan eut un mouvement de recul, regardant chacune des personnes présentes, avec un œil nouveau, les examinant par le détail…

C’est à ce moment là que Gomina se mit à faire le guignol pour attirer l’attention de chacun et offrir un lieu de réunion.

Après tout, pourquoi pas… Venez tous, nous serons plus tranquilles pour discuter et préparer la nuit prochaine.

En entrant, Jehan demanda à l’employé qui se trouvait à l’accueil d’aller afficher à la mairie, l’annonce de la réunion qui allait se tenir à l’hotel du Riz dès à présent.

Une fois dans la salle, Jehan prit la parole plus solennellement et annonça aux habitants la nouvelle qui n’allait sans doute pas réjouir les locaterciens.

Ce matin, j’ai croisé le curé. Il est bien décidé à allumer le bûcher chaque jour avec les fanatiques qui l’entourent, mais dans sa grande mansuétude, accepte de tenir compte de nos avis pour le choix de la personne suspectée. Je vous demande donc à tous de bien réfléchir et de lui indiquer qui vous soupçonnez afin qu’on évite les drames comme celui de ce matin… une pauvre innocente… Jehan baissa les yeux en se remémorant la scène du bûcher. Puis, il reprit :

Le mieux est peut être d’en parler entre nous dès maintenant. Avez-vous des soupçons ? L’un d’entre vous a-t-il une idée sur qui pourrait ainsi se transformer durant la nuit ?

Deux petites culbutes et un salto auront suffit à Gomina pour retomber droit dans son pantalon au saut de son lit. La discussion de la veille avait été très importante, et Gomina était rentré plutôt satisfait de cette réunion, même si le maire s'obstinait à conserver l'usage du bûcher. Mais quelque-chose n'allait pas. Il chercha bien mais eut du mal à mettre le doigt sur ce qui clochait...
- Les personnes présentes ? L'éclairage ? L'apéritif ?

Il fit le tour de chaque détail, mais rien n'en sorti. Non il y avait autre-chose.
Il mit machinalement la main à la poche, et c'est là qu'il comprit.
- On m'a fait les poches ! Non, pas ça... on m'a volé ma... la petite peste, je suis sûr que c'est elle !

Il sorti immédiatement de chez lui, dans l'heure, sans même petit-déjeuner, et furieux, et se rendit en direction de l'Hôtel du Riz.
- Avec un peu de chance...

Ce matin-là, Forestine eut bien du mal à quitter son lit.
A celà il y a avait plusieurs raisons :
Premièrement, dehors il faisait gris et froid.
Deuxièmement, elle avait subi le contrechoc des derniers événements et n'avait quasiment pas pu fermer l'oeil de la nuit.
Et troisièmement, le monde qui l'entourait lui paraissait hostile, bien plus hostile encore qu'auparavant.
Elle n'avait tout simplement pas envie de mettre le nez dehors.

Pourtant, une petite voix réussit à la faire bouger.
J'ai faim Maman .
Oh, ma chérieeeeee. J'arrive mon petit trésor.

La petite Rose était montée sur le lit de sa mère pour êre sûre que celle-ci n'allait pas se rendormir.
Forestine l'embrassa sur le front puis se leva pour lui donner de quoi se nourrir.
Comme tous les jours , les réserves étaient maigres. Cela suffit à redonner assez de courage à Forestine Grandjean pour retourner au village afin de gagner sa pitance.

La jeune mère se prépara rapidement et partit d'un pas vif vers la boulangerie.

En chemin, elle vit que pas mal d'habitants étaient dans les rues discutant des derniers ragots.
-Ah, enfin tu es là. Dépêche toi, mets le tablier . Aujourd'hui tu t'occuperas encore des clients, je dois discuter avec le fournisseur de farine, dit Marie d'un voix sans réplique à Forestine.

Sitôt dit, sitôt fait, Forestine prit son poste avec le sourire accueillant qu'on attendait d'elle.
Pourtant peu à peu, son sourire disparut. Elle venait d'apprendre qu'on avait perdu deux Locaterciens dans la nuit.
Quand Marie revint, Forestine lui apprit les nouvelles.

Ohhhh, c'était donc ça ! Ohhhhhh cette odeur terrrrrrible ! Ohhhhhhh, pauvre Gauvin. Lui toujours si discret !
Et puis, pauvre gamin. Le p'tit Aldo ! Ohhhhh, je le revois encore faire les quatre cents coups avec ses amis devant la boutique !
Ohhhhhhhhhh !
Marie poussa des "ohhhh" horrifiés pendant encore plusieurs minutes qui parurent une éternité.
Enfin, lorsqu'elle reprit contentance, elle regarda Forestine.

J'ai encore besoin de toi aujourd'hui. Il faut livrer plusieurs miches à l'hôtel du Riz.
La mort de tous ces gens m'a trop bouleversé. C'est toi qui ira là-bas.
Va, va dépêche toi. Le nouveau patron veut être livré avant midi.

Marie-Line fut rassurée par la réponse de Vladilir, poussa un soupir de soulagement et se détendit dans son fauteuil. Plus de tremblements des membres, ni de claquetis des dents ; la jeune femme avait retrouvé toute sa sérénité.

Ahhh ces hallebardes sont donc pour le Maire... et le couteau pour vous défendre... Bah, ma foi...

Ecoutant attentivement la proposition du forgeron...

S'organiser pour assurer notre sécurité... Oui sans doute, mais... Elle ne finit pas sa phrase, voulant garder pour elle ce à quoi elle pensait...

Hum... passer la nuit ici ..? se barricader ...? euh... Je ne sais pas...

Se tournant vers Gomina...

Et vous Gomina, qu'en pensez vous ?

Depuis son arrivée à l'Hôtel du Riz, Gomina était sollicité de tous les côtés. A tel point qu'il eut presque l'impression de tenir le rôle du maire.

Discutant de pics et de pointes avec le forgeron, ils furent d'abord rejoints par une jeune-femme qu'il avait déjà croisé plusieurs fois auparavant. A sa question, il répondit :
- Dame... moiselle ? Marie-Line c'est bien cela ? Je m'accorde avec sieur Vladilir sur l'importance et l'urgence de se défendre ! Je n'osais y croire jusqu'à présent, mais le village de Thiercelieux traverse en ce moment la plus grande crise qu'il ait connu ! La plus grande crise économique, car s'il ne survit plus aucun honnête habitant, plus personne ne pourra acheter ni consommer quoi que ce soit ! Et moi mort, cela m'importera bien peu qu'un de ces loups-garons vienne acheter une carriole dans ma concession ! Aussi, je cède bien volontiers les locaux de l'Hôtel du Riz à la communauté comme lieu de protection de tous les habitants ! En espérant bien évidemment que cela ne devienne pas le garde-manger de ces démons...
- Messire Gomina ? Je suis Forestine Grandjean. Je viens de la part de Marie la boulangère. J'ai le pain que vous aviez commandé.
- Le pain ? Oh, oui, le pain...

Il prit quelques miches en main, et se mit à les lancer en l'air les unes après les autres. Mais s'apperçevant que son public n'était peut-être pas prêt à apprécier un numéro de jonglage à pareil moment, il s'arrêta aussi sec, et remit les miches dans un panier.
- Hé bien, il tombe plutôt bien votre pain, mais la quantité est bien insuffisante pour nourrir tous ceux qui viendront prendre refuge en ma demeure ! Aussi, je me vois obligé de vous passer une nouvelle commande... Pourriez-vous demander à votre patronne de doubler la quantité pour ce soir ?

Il regarda autour de lui, et continua :
- Mais au fait, où se trouve monsieur le nouveau maire ? Quelqu'un l'a-t-il vu aujourd'hui ? J'espère seulement qu'il ne lui est rien arrivé...